Le coût de la vie demeure parmi les principales préoccupations de plusieurs Canadiens et de récents commentaires semblent déterminés à effrayer les consommateurs quant à la façon dont les prix des aliments ont été maintenus « artificiellement bas » (comme tout récemment, les bonbons d’Halloween). On suppose ainsi qu’il est mal intentionné de maintenir la stabilité des prix en modifiant la taille des emballages, peu importe si de tels changements en poids ou en volume sont clairement identifiés sur l’étiquette.
Comme j’ai écrit à maintes reprises, l’inflation persistante est déjà suffisante pour nous effrayer. Les grands titres à sensation et la recherche de coupables ne parviennent pas à reconnaître la réalité complexe de l’inflation (un phénomène mondial, soit dit en passant). Rejeter le blâme ne fait rien de bon pour résoudre de façon significative les causes de l’inflation et n’identifie aucune véritable solution par laquelle le Canada pourrait atténuer de façon constructive l’impact de l’inflation.
Voici quelques réalités autrement plus productives que les histoires à faire peur.
Réalité 1 : Les consommateurs canadiens (comme la grande majorité de leurs pairs du monde entier) placent constamment le prix comme principale priorité de leurs décisions d’achat d’aliments. Le Rapport 2023 sur la confiance du public du Canadian Center for Food Integrity dévoile que le coût des aliments est la principale préoccupation des Canadiens, tout comme c’était le cas dans chacun des cinq précédents rapports de cet organisme.
Réalité 2 : Une crise inflationniste qui dure plusieurs années fait en sorte que tout coûte plus cher, à fabriquer comme à consommer. Les producteurs d’aliments font face à des augmentations de coût significatives pour leurs ingrédients, leur énergie, leur main-d’œuvre et autres. Néanmoins, une récente étude menée par Ubuy indique qu’en dépit de ces coûts accrus, l’inflation du prix des aliments au Canada demeure plus faible que chez plusieurs de nos pairs économiques du G7.
Les entreprises du secteur des produits alimentaires, de santé et de consommation du Canada s’efforcent constamment à gérer de leur mieux ce contexte inflationniste et à livrer aux Canadiens les produits auxquels ils font confiance. Malheureusement, certaines circonstances ne laissent à ces entreprises que deux choix : prendre la position difficile, mais compréhensible de hausser leurs prix, ou tenter de conserver des prix stables en modifiant certains facteurs comme la taille des produits ou leurs ingrédients.
Aucune de ces décisions n’est prise à la légère ou sans difficulté considérable. Par exemple, vu que certains produits ne sont pas vendus directement aux consommateurs, mais plutôt aux grandes chaines d’épicerie qui contrôlent 80 % du marché de l’épicerie canadien, souvent ces épiciers refusent tout simplement les augmentations de prix de leurs fournisseurs.
Une autre option pour les manufacturiers, mais qui demande un temps considérable, consiste à rechercher des ingrédients à moindre coût sans affecter le goût et la qualité que les consommateurs exigent. Trouver de nouvelles sources d’ingrédients et modifier les recettes n’est pas tâche facile et ces changements sont rarement réalisables à court ou à moyen terme.
Pour toutes ces raisons et bien d’autres, certains manufacturiers peuvent décider de modifier la taille d’un produit afin d’en stabiliser le prix. Dans certains cas, le poids ou le volume du produit demeure clairement identifié afin que les consommateurs puissent décider de l’acheter ou d’en choisir un autre.
Tous ces choix impliquent un échange et plusieurs causes sous-jacentes échappent à tout contrôle immédiat. À l’Halloween, ou à n’importe quel moment, les agriculteurs et producteurs d’aliments canadiens ne peuvent pas compter sur une formule magique pour éviter la météo extrême, pour faire cesser la guerre en Ukraine ou pour résoudre les nombreuses autres interruptions qui affectent nos chaines d’approvisionnement complexes et surtaxées.
Ce que les producteurs d’aliments, les détaillants et les gouvernements du Canada peuvent faire et doivent faire, c’est résoudre les contraintes qui depuis trop longtemps nuisent au plein potentiel de l’épicerie, du secteur manufacturier et des chaines d’approvisionnement du Canada. Des mesures concrètes doivent être mises en place afin de combler nos carences de main-d’œuvre, réduire le fardeau abusif de la règlementation et mettre en place un Code canadien de conduite en épicerie qui réduira les frictions et les coûts associés aux pratiques déloyales dans l’alimentation au détail.
Dans son rapport de juin 2023 sur le prix des aliments, le Comité permanent de l’Agriculture et de l’agroalimentaire de la Chambre des Communes mentionnait que « les relations dans la chaine d’approvisionnement alimentaire ont une influence majeure dans la manière dont les prix se transmettent dans la chaine d’approvisionnement et se répercute ultimement sur le consommateur.» Ce rapport indique le besoin d’améliorer la transparence et d’assurer l’équité tout au long de la chaine d’approvisionnement comme façon d’atténuer les facteurs complexes qui affectent la facture d’épicerie des Canadiens.
Chez PASC, nous sommes d’accord. Le formidable défi que représente l’inflation exige le respect mutuel et des solutions, plutôt que des épouvantails.