Le Canada n’a aucun contrôle sur certains facteurs susceptibles d’aggraver les augmentations de prix des aliments et de l’épicerie au Canada à très court terme, ce qui rend encore plus critique le fait d’éviter les crises comme l’imminente grève du rail et finalement corriger les faiblesses de longue date qui sont sous notre contrôle.
Il y a deux semaines, l’Ukraine était le grenier de l’Europe; aujourd’hui elle est assiégée par les forces russes. L’objectif le plus urgent consiste à stopper ce conflit. En plus des tragiques pertes de vie en Ukraine, les experts craignent que la chute du secteur agricole de ce pays, autrefois fertile, entrainera une insécurité alimentaire dans la région et provoquera la rupture des chaines d’approvisionnement déjà affaiblies par deux années de pandémie et d’autres difficultés.
L’Ukraine fait partie des plus importants producteurs de blé, d’huile de tournesol et d’engrais sur la scène mondiale. Bien que le Canada ne dépende pas de l’approvisionnement en Ukraine pour ces produits en soi, on s’attend à ce que les prix du marché mondial pour ces denrées (sans mentionner les coûts de l’énergie et des transports) augmentent de façon significative en raison de la guerre ainsi que des sanctions imposées à la Russie. Les prix du pétrole sont en hausse de 25 %, et ceux des engrais nord-américains d’environ 10 %.
Plus près de chez nous, la possibilité d’une rupture des négociations entre le Chemin de fer du Canadien Pacifique et la Conférence du rail de Teamsters Canada pourrait entrainer une grève du transport ferroviaire qui causerait un tort considérable aux manufacturiers canadiens comme aux chaines d’approvisionnement. CP Rail est un lien critique pour les chaines d’approvisionnement du secteur manufacturier.
Les 16 000 travailleurs du rail membres des Teamsters facilitent le déplacement de biens et d’ingrédients essentiels dans l’ensemble du Canada. Un arrêt de travail de leur part serait catastrophique. Les ruptures d’expédition et de camionnage, notamment le mandat de vaccination des camionneurs et les protestations qui l’accompagnent, ont provoqué des retards importants et de fortes augmentations de coût. Les parties doivent de toute urgence en venir à une entente et le gouvernement fédéral doit être prêt à prendre les mesures nécessaires afin d’éviter toute interruption du transport ferroviaire.
Aux dires d’un sondage publié par Manufacturiers et exportateurs du Québec (MEQ) le 9 mars, 90 pour cent des manufacturiers canadiens font déjà face à des ruptures de chaine d’approvisionnement. Soixante pour cent considèrent ces ruptures majeures ou sévères. La grande majorité des manufacturiers touchés ont dû trouver d’autres sources où se procurer leurs principaux intrants (70 %) et se sont vus forcés d’augmenter leurs prix à la consommation (80 %), comme les détaillants.
Les manufacturiers canadiens de produits alimentaires et d’épicerie ont tout au long de la pandémie fait pression sur le gouvernement afin qu’il priorise les actions soutenant l’approvisionnement sûr et résilient en produits alimentaires, de santé et de consommation. Bien que le Canada ne soit pas immédiatement en mesure d’arrêter la guerre en Ukraine, le gouvernement peut et doit prendre des mesures pratiques afin de relever les défis de main-d’œuvre, de transport et de vente au détail.
Après deux années d’interruptions constantes par la COVID-19 et les conditions météorologiques extrêmes, la chaine d’approvisionnement canadienne ne saurait encaisser un autre choc. Nous devons trouver des solutions dès aujourd’hui et définir un échéancier pour l’avenir qui fera de nos chaines d’approvisionnement une priorité au cœur d’une économie résiliente et autosuffisante.
Nous devons agir comme si l’avenir du Canada dépendait des manufacturiers de produits alimentaires et d’épicerie et des chaines d’approvisionnement, car c’est effectivement le cas.