En tant que chef de la direction de Produits alimentaires, de santé et de consommation Canada et coprésident du Comité d’orientation du Code de l’épicerie, je suis impliqué dans le développement du Code de conduite de l’épicerie depuis plus de trois ans. Ce cheminement représente non seulement un virage en termes de politiques, mais aussi un moment transformateur pour l’industrie canadienne de l’épicerie, accompagné de la promesse d’une refonte pour le bien collectif.
Au fil de ces années, il est devenu de plus en plus clair que le déséquilibre entre une poignée d’entreprises qui contrôlent 80 pour cent du marché de l’épicerie et leurs fournisseurs doit être résolu. Depuis longtemps, ce déséquilibre fait obstacle à la concurrence et nuit à l’innovation, ce qui fait mal aux Canadiens et à l’industrie dans son ensemble. Les négociations prolongées et intenses en vue d’un Code de conduite de l’épicerie, qui exigent des compromis de toutes parts, reflètent notre effort unifié visant à résoudre et à corriger cet enjeu profondément ancré.
Toutefois, le cheminement n’est pas exempt de défis. Certains détaillants ont perdu de vue, ou choisi d’ignorer, l’intention fondamentale du Code. Ils cherchent à l’amender au risque d’en diluer l’utilité. Cette résistance est fondée sur le désir de conserver le contrôle intégral sur la relation détaillant-fournisseur. Leurs actions perpétuent précisément les déséquilibres que le Code vise à résoudre et ce faisant, menacent la mission initiale avancée par les ministres fédéral, provinciaux et territoriaux.
Le Code en lui-même est plus qu’un simple ensemble de nouvelles règles; il représente une occasion qui ne se présente qu’une fois par génération de corriger les iniquités historiques de notre industrie. Son développement est le fruit d’un effort collaboratif, où des détaillants comme Metro et Sobeys ont joué un rôle crucial en démontrant qu’ils avaient compris la nécessité d’apporter des changements significatifs. Le succès d’un tel Code exige une transformation culturelle dans l’ensemble de la chaine d’approvisionnement, fondée sur le désir de créer une plus grande certitude économique pour les manufacturiers, les producteurs agricoles et les détaillants indépendants.
Un des aspects essentiels de ce Code réside dans son potentiel d’outiller les détaillants indépendants. En favorisant un marché plus dynamique et concurrentiel par un approvisionnement équitable, le Code se conforme à l’objectif du gouvernement qui veut favoriser la concurrence équitable dans tous les secteurs, y compris l’épicerie au détail. Aucun détaillant d’épicerie étranger ne se montre intéressé à entrer sur le marché canadien. Si nous souhaitons atteindre notre objectif d’encourager la concurrence, la seule façon consiste à créer un canal dynamique de détaillants indépendants. Nous devons trouver des moyens de le faire.
La réussite de l’implantation de codes similaires à ceux du Royaume-Uni et de l’Australie nous donne aussi des leçons précieuses, en démontrant que ces changements de dynamique entre détaillants, fournisseurs et consommateurs peuvent entrainer la formation d’un écosystème plus sain dans l’industrie, sans affecter négativement sa stabilité financière. Nous devrions être confiants que ces marchés, où un code a eu un impact sur l’inflation par la stabilisation des prix au consommateur, a créé un environnement commercial ciblé de bout en bout sur la valeur et les efficiences. Ce scénario ou tout le monde gagne a favorisé l’investissement dans l’innovation et créé de la valeur pour le consommateur et ce, de plus d’une façon. Ceux qui ont choisi de se concentrer sur les implications négatives du Code ignorent l’évidence et résistent au progrès afin de poursuivre leurs propres objectifs.
Les progrès réalisés par Metro et Sobeys en soutenant le Code méritent d’être soulignés, mais il reste encore beaucoup à faire pour stimuler la croissance. Pour que le Code soit vraiment efficace, il doit être fondé sur le principe de l’inclusion totale, applicable à tous les produits, et renforcer l’idéal qui veut qu’un tel Code profite à tous les aspects des affaires des détaillants. Le traitement des fournisseurs de non-alimentaires et alimentaires doit être le même. Les fournisseurs de produits alimentaires ont besoin de soutenir le code afin de gérer leur relation avec les détaillants. Ce code doit couvrir toutes les catégories, sans exception.
Malgré ces progrès, nous faisons face à un recul potentiel de la part de quelques grands joueurs qui refusent de s’impliquer depuis le départ. Le Code mettra en place un avantage compétitif pour les détaillants qui y adhèreront. Néanmoins, nous sommes toujours engagés à aller de l’avant. Les principes enchâssés dans le Code peuvent possiblement rapporter des bénéfices considérables pour toutes les parties impliquées et nous sommes prêts à collaborer avec le gouvernement afin d’explorer des solutions règlementaires, au besoin, bien que nous préférions une approche volontaire et collaborative. La redevabilité est un facteur clé du progrès. Pour ceux qui refusent d’y prendre part, il est essentiel que les Canadiens et le gouvernement se questionnent sur leurs motifs. Pourquoi refusent-ils une solution éprouvée et transformatrice qui promet de livrer d’importants bénéfices aux détaillants, fournisseurs et plus important encore, aux consommateurs canadiens?
Parfois, je crois que trois ans, c’est peu de temps quand on pense au progrès accompli. Mais le temps presse.
Le Code de conduite de l’épicerie est devenu plus qu’un ensemble de lignes directrices; il représente l’engagement tant attendu vers un secteur de l’épicerie plus équitable et plus prospère. Le temps est venu d’agir, n’attendons plus.